L'observatoire acoustique
Les cétacés passent une grande partie de leur vie sous l'eau où ils sont difficilement détectables par les observateurs. L’acoustique permettrait de compléter les données d'observation visuelle sur la vaste étendue du Sanctuaire Agoa en limitant la présence humaine.
La technique employée par les équipes du Sanctuaire est celle de l'acoustique passive qui enregistre directement les sons ambiants et présente plusieurs avantages pour le suivi des populations de mammifères marins :
- détection d’espèces discrètes,
- continuité d’acquisition (jour/nuit, intersaisons,..) quelles que soient les conditions météorologiques et dans des zones parfois peu accessibles,
- enregistrement de signaux acoustiques qui permet de ‘rejouer’ les enregistrements pour analyse a posteriori et utilisation pour la sensibilisation,
- enregistrement des autres sources de bruit pouvant avoir un impact sur les mammifères marins (trafic maritime).
Le Sanctuaire Agoa teste depuis plusieurs années du matériel permettant l’acquisition des sons sous-marins. La mise en place d’un observatoire acoustique permettra d’acquérir des données afin de mieux appréhender le bruit généré par l’Homme mais aussi de caractériser les espèces et les populations résidentes ou non au sein du Sanctuaire.
Voici des extraits de ce que l'on peut entendre sous l'eau grâce aux hydrophones.
Les hydrophones Jason HighBlue
Dans le cadre du projet interreg’ CARI’MAM, le Sanctuaire Agoa coordonne le déploiement d’hydrophones sur 14 territoires de la Grande Région Caraïbe (Martinique, Guadeloupe, Haïti, Saint-Eustache, Aruba, Bonaire, Saint-Barthélemy, Anguilla, Saint-Martin, les Bermudes, Saint-Vincent et les Grenadines, les îles Turques et Caïques, les Bahamas, la Jamaïque, la République Dominicaine).
Vingt hydrophones sont déployés depuis décembre 2020 pour enregistrer les sons émis par toutes les espèces de mammifères marins passant à proximité. Ils ont été fabriqués spécialement pour cette mission par l'université de Toulon. Immergés par vingt mètres de profondeur pendant un an, ils seront remontés tous les 40 jours pour récupérer les données et être entretenus. Ils sont capables de détecter des sons inaudibles par l'oreille humaine et capteront également la pollution sonore liée aux activités humaines. Ces données seront ensuite analysées par un logiciel d’apprentissage profond.
Cette action est le fruit d’une collaboration intense entre les spécialistes des mammifères marins de la Caraïbe par l’intermédiaire du réseau CARI’MAM (Caribbean Marine Mammals).
Gérald détaille dans ce podcast le projet d'hydrophones Jason High Blue mis en place dans la Caraïbe dans le cadre du projet CARI'MAM.
Les C-POD
Fin 2015 et début 2016, des enregistreurs de type C-POD ont été déployés en phase pilote en Guadeloupe. Ils avaient pour objectif d’acquérir des données sur les delphinidés du Sanctuaire Agoa en enregistrant leurs clics.
C’est la première fois que ce dispositif était déployé dans les eaux tropicales qui sont fréquentées par de nombreuses espèces émettant des clics. Deux espèces ont pu être identifiées acoustiquement, les grands dauphins (Tursiops truncatus) et les sténos rostrés (Steno Bredanensis). Grâce aux enregistrements de clics récoltés, une période et une zone géographique de repos des dauphins ont pu être identifiées. Les C-POD ne permettent cependant pas de détecter le nombre d’individus et il est pertinent de coupler les enregistrements à des observations visuelles opportunistes ou standardisées.
Ce test a aussi montré que pour être plus efficace, il fallait éloigner les enregistreurs des côtes. En effet, les côtes antillaises contiennent beaucoup de bruits parasites (comme les clics des crevettes claquantes par exemple). Les C-POD étant programmés pour enregistrer automatiquement chaque clic détecté, quelle que soit son origine, les cartes mémoires des enregistreurs sont vite pleines et il conviendrait de les remonter très régulièrement.
Suivi acoustique et pollution sonore
L'installation d'hydrophones permet, outre le suivi des mammifères marins, d'écouter les bruits générés par les activités humaines.
Les méthodes de suivi acoustique active, comme les sonars, permettent également d'étudier les fonds marins. Leur usage contribue cependant à la pollution sonore de l'environnement marin. En effet, le principe de l'acoustique active est d'émettre un son depuis un dispositif. Ce son va se répercuter sur les animaux et le relief environnant et revenir au dispositif qui l'enregistrera.